Il était une fois... Des faims de vivre

4/ Le tablier magique

Madame 63ans arrive à l’atelier, perche à perfusion à la main, accompagnée de sa fille. Elles souhaitent faire une séance ensemble. Je leur propose, avant tout, de « changer de peau » et de choisir la couleur de leur tablier en lin : rose corail pour l’une, bleu turquoise pour l’autre. Après les avoir mis, elles se regardent. « On est trop belles dans nos tabliers ! Vous pouvez nous prendre en photo ? » Je photographiais donc deux personnes prêtes pour la création, la maladie n’était plus, le temps de l’atelier, dans le paysage de ces deux femmes.

Pour Madame 58ans, le premier acte symbolique qui se faisait dans sa chambre était de se parer de « la peau du peintre », large tablier jaune en lin qui recouvrait son corps et son lit. La malade décharnée se transformait en personne en création qui évoluait avec la couleur, les fusains, les pastels gras, les pastels secs… Madame 58ans me demande un jour de lui acheter un tablier jaune, « le même » me dit-elle, « en souvenir ». La voyant très faible en fin de séance je n’en reparle pas mais son mari revient vers moi après, avec l’argent, pour me confirmer cet achat très important pour sa femme. J’ai acheté ce tablier, je l’ai remis à Madame 58ans qui est décédée quelques jours après. Qu’est-ce qui motivait l’envie de s’acheter un tablier en lin jaune avant sa mort ? Dernier achat, dernière parure, dernière « folie » avant sa mort.

Merci de m'avoir accordé votre attention pendant ce récit. Je reste convaincue que l'ouverture à la création peut apporter des bénéfices significatifs tant sur le plan professionnel que personnel.

N'hésitez pas à me contacter si vous souhaitez en discuter davantage.

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